jeudi 5 juin 2014

Virginie Ropars, une artiste 4 ****

Après huit mois d’hibernation, me revoilà ENFIN, avec une interview qui m’est chère.
Celle d’une étoile de la sculpture.
De Virginie Ropars.
A la fantastique féminité.

Cette Bretonne aux doigts de fée cisèle ses personnages entre racines et ailes, aplomb et vertige, à l’unisson avec une Nature oubliée. Telle une couturière, elle darde les matières, les volumes, les mouvements, invoque et évoque un art brut, libre et à fleur de peau.

Prenez un verre d'hydromel, votre laptop sur les genoux, et dégustez cette belle et longue interview !

Waterfall, 88 cm

Vos personnages sont d’un tel réalisme qu’on a le sentiment qu’ils s’apprêtent à se mouvoir. Comment en arrivez-vous à une telle précision ? Une formation spécifique, ou davantage un regard autodidacte et ouvert sur la vie ? 

Je ne peux pas dire que j’ai été formée spécifiquement à la sculpture, même si elle a fait partie de mon cursus lors de mes études, mais j’étais alors plus attirée et active dans le dessin. Le travail de la terre ne me plaisait pas et je n’avais pas eu l’occasion d’expérimenter d’autres matériaux. Mais même en dessin j’attachais beaucoup d’importance à l’expression et aux petits détails qui font la différence et rendent une expression plus subtile ou ambivalente, donc  plus intéressante à mon sens. Cela passe par de toutes petites choses et j’aime beaucoup cette réactivité de l’argile polymère que j’utilise pour modeler mes visages. Une petite caresse du doigt au niveau du front par exemple et tout peut changer. Lorsque je modèle un visage je m’attache beaucoup à ce qu’il dégage devant moi, même en pleine construction. Même si je suis en recherche d’une expression que j’imagine la bonne, je fais en sorte de lâcher prise afin de laisser les expressions sortir et me surprendre, et parfois cela marche mieux. Il faut se laisser aller, c’est comme essayer de prendre du recul devant un miroir et s’imaginer que ce n’est pas un reflet de soi qu’on a en face, on regarde un autre être que l’on ressent en même temps à l’intérieur de soi. Il y a toujours une intention dans ces petites têtes que je modèle, j’essaye d’y mettre une sorte d’ « âme ». C’est le contraire d’un objet transitionnel comme l’est habituellement la poupée, c’est-à-dire un objet généralement vide qui est un réceptacle pour soi-même. C’est aussi ce qui dérange parfois dans mes travaux, notamment chez certains collectionneurs de poupées, il n’y a pas de place pour soi dans ce que je fais. J’essaye de donner à mes personnages une expression à un instant T. C’est aussi pour cela je pense que les personnes ayant peur des poupées ou des clowns par exemple, ne ressentent pas cette peur avec ce que je fais, c’est le vide intérieur qui terrorise, et ce vide ne m’intéresse pas.

Conçue pour le Spectrum Fantastic Art Live 2, 30cm

A l’époque, aviez-vous déjà le sentiment que le dessin et la 3D n’allaient pas vous satisfaire longtemps ? Que vouliez-vous exprimer que vous ne pouviez pas alors ?

Je crois que j’avais surtout un besoin de matière réelle, de toucher des choses et surtout de m’éclater avec des matériaux différents, le dessin et la modélisation 3D n’apportent pas cela. C’est aussi très enthousiasmant d’amener un objet dans le monde réel avec ses propres mains. Je pense que c’est surtout cela qui me manquait avec le dessin, j’adore le dessin, cela me nourrit, le travail des autres me donne de l’énergie pour continuer mon propre travail, mais je ne me suis jamais sentie à l’aise totalement avec un crayon et une feuille de papier, c’est une question de langage peut-être, ou simplement une question d’outil pour s’exprimer. J’ai toujours été fascinée par les tissus, les objets, les bijoux, les bibelots, je me sens plus à l’aise avec toutes ces choses palpables que je dois dompter pour arriver à mes fins. Et j’aime surtout associer plein de choses différentes et essayer d’y trouver une cohérence.


En remontant à votre enfance, que pensez-vous qui vous a progressivement influencée, au point de révolutionner le monde de la figurine ?

Je ne saurais pas répondre à cette question et je ne pense pas avoir révolutionné quoique ce soit, je n’ai rien inventé, j’ai peut-être poussé le truc un peu plus loin sur certains aspects techniques mais c’est tout, et encore, je n’ai aucune certitude là-dessus. De mon enfance vient surtout un goût prononcé pour certaines choses, le goût pour les choses un peu fantasques et fantastiques, une esthétique d’un autre âge, les choses un peu riches et surchargées, les associations de textures et de couleurs, le goût des choses précieuses, dramatiques, élégantes et très travaillées. Je ne me suis pas découvert ces goûts sur le tard, tout cela m’a construite et je continue de caresser ces goûts-là en moi, parce qu’ils font partie de moi et donc de mon travail.

Shepherd of the Monsters, 86 cm

Tout peut vous inspirer, un livre, une peinture, une forêt, une lumière… Mais comment en venez-vous à imaginer ces personnages ? Que représentent-ils pour vous ?

L’imagination est un mystère et c’est plutôt bien si ça reste comme ça. Je ne cherche pas trop, je me laisse porter. Je compare ça à une pièce montée, dans la tête je rajoute des choses les unes après les autres et l’idée progresse comme ça. Les formes changent, les couleurs, l’impulsion de base, ce n’est pas différent d’un jeu, lorsqu’on est gamin et qu’on invente des choses au fur et à mesure en jouant juste parce que ça nous semble approprié ou cohérent avec ce qu’on est en train de jouer sur l’instant. Les choses se percutent dans le cerveau, ça fait partie du plaisir. En ce qui concerne ce que mes personnages représentent pour moi, surtout un instant T de travail et de plaisir, ce qui compte est toujours le travail suivant pour moi, je ne m’attarde pas sur ce que je viens de faire. Je n’ai pas de mal à les voir partir et j’aime bien l’idée qu’une fois le travail terminé il doit vivre sa propre vie sans moi. Ce ne sont pas mes enfants ou des petits bouts de moi. J’aime cette idée de la progression d’une œuvre sur toute une vie ou une longue période, c’est pour cela que je ne m’attache pas, s’attacher à ses travaux c’est le meilleur moyen pour stagner et ne plus avoir rien à dire ou à donner. C’est très narcissique comme attitude à mon sens. Cela ne veut pas dire que je délaisse mes œuvres une fois terminées, je reste derrière en cas de soucis ou de choses pratiques à gérer, mais c’est tout.


Vous souvenez-vous de votre toute première figurine ? Où est-elle en ce moment ?

J’ai fait ma première sculpture du type de ce que je fais actuellement en novembre 2003, je fête donc cette année mes 10 ans. Je n’ai jamais cessé depuis cette première pièce. Elle est assez monstrueuse si je la compare à mon boulot d’aujourd’hui, mais à l’époque, j’étais contente du résultat, enfin j’ai su tout de suite que les possibilités étaient infinies et la marge de progression technique assez énorme si je me donnais la peine de continuer. Je savais aussi que je n’allais pas me lasser de ça rapidement, tous les aspects techniques ou artistiques permettant une évolution permanente. Je n’ai toujours pas fait le tour et je suis toujours aussi enthousiaste lorsque je travaille sur une nouvelle pièce. Ma première pièce se trouve chez moi rangée dans un coin, je ne la montre pas, mais elle est là, mes premières pièces sont soit chez moi, soit chez mes parents. Je ne les ai pas vendues, car techniquement ce n’est pas au niveau, et comme je testais plein de choses à l’époque, notamment sur la structure interne, ce n’est pas toujours très stable, ni bien pertinent techniquement.


Gardez-vous toujours la même émotion une fois votre pièce terminée ? Vous sentez-vous grandie ou plutôt vidée ?

Il y a surtout des boulots dont je suis contente car je pense avoir passé un cap, qui pour le spectateur ne se voit pas forcément, mais moi je sais que j’ai avancé techniquement et que cela va m’apporter d’autres possibilités par la suite. Je suis souvent contente d’avoir fini une pièce car j’ai souvent la suivante déjà en tête et mon attrait pour celle que je suis en train de faire baisse vraiment sur la fin. Je passe rapidement à autre chose, c’est pour ça aussi que je n’aime pas trop traîner lorsque je commence quelque chose, j’aime bien travailler d’une traite pendant 3 semaines, un mois, parce que je sais immanquablement que je vais penser à autre chose sur la fin. Et je déteste avoir à faire une pause dans mon boulot si je dois partir ou faire autre chose. J’aime aussi faire tout de même une petite pause entre chaque pièce, c’est nécessaire, nettoyer l’atelier et la tête, lire des choses, me nourrir d’autre chose et bien réfléchir à ce qui va suivre…

Epeira Diademata, 30 cm


Cela vous prend parfois des années à réunir les pièces d’un puzzle inconscient. Quand c’est le cas, les 3-4 semaines de fabrication ne paraissent-elles pas trop longues ?

Pas vraiment, c’est un temps incompressible pour moi et les choses s’enchaînent généralement sur un bon rythme, je passe d’une activité à une autre, je fais en sorte que ça puisse couler un peu tout seul. Si une pièce est bien pensée en amont c’est souvent facile, et j’ai beaucoup de plaisir à bosser, même si la pièce tourne dans ma tête depuis longtemps. Lorsque je bosse, je ne suis plus vraiment dans la création, c’est seulement l’étape de la réalisation, le jeu avec les matériaux, et ce jeu ne change pas vraiment que la pièce ait été longue à concevoir en pensée ou non. Je tiens vraiment à cette notion de plaisir et de jeu dans le travail, c’est essentiel, et c’est aussi le seul moyen pour moi d’avoir quelque chose d’abouti et qui se tienne à la fin. Si je lutte contre moi-même pour faire un truc qui ne me parle pas à 100 % à l’instant où je le fais, ce n’est donc pas le bon moment et le boulot est moins bon. C’est également pour cela que je ne prends pas de commandes, pour justement éviter de me fatiguer, de donner moins, ou moins bien. Personne n’est content dans l’affaire, ni le client, ni moi. J’aimerais que les gens soient plus conscients de cela lorsqu’ils demandent quelque chose à un artiste. La maîtrise technique n’est pas tout, il faut aussi être à 100 % motivé par ce qu’on fait, être vraiment dedans et surtout avoir du plaisir pour que le boulot soit bon. Quand un artiste s’éclate, le boulot s’en ressent, il est plus fort, meilleur et claque plus, généralement tout le monde est d’accord là-dessus. Malheureusement les gens qui passent commande ne comprennent souvent pas cela et voient souvent l’artiste comme un artisan, une paire de mains et un cerveau ayant un univers qu’ils fantasment totalement en fonction des travaux de vous qu’ils ont pu voir. Mais pour qu’une œuvre vous touche, il faut que l’artiste soit dedans, qu’il y trouve son compte, or on ne peut pas toujours glisser des choses de nous, qui feront sens, lorsqu’on doit se couler dans l’idée, la demande, ou la vision d’un autre. Le travail doit aussi nous nourrir et nous grandir, c’est un échange permanent entre soi et le travail en cours de réalisation.

Melusine, 62 cm

Vous fixez-vous une hauteur maximum pour vos sculptures, y en aura-t-il un jour une à échelle humaine ?

En fait je n’ai pas réellement choisi la taille de mes pièces, elle s’est imposée d’elle-même. Je pense que c’est une taille avec laquelle je suis contente, mes doigts sont contents lorsque je travaille. J’ai fait quelques pièces légèrement plus grandes par le passé, pas de beaucoup, 1 cm / 1,5 cm de plus sur une hauteur de visage, pas plus, mais je me suis aperçue que toute cette surface en plus ne me servait à rien, je n’en disais pas plus sur un visage. Avec le temps, je me suis aperçue qu’il existait une taille critique qui dans le cerveau humain change la relation à l’objet, l’effet n’est pas le même lorsque les gens regardent mes pièces qui mesurent 50 / 60 cm et celles d’un mètre. Il y a un positionnement du regard qui change et un rapport à l’objet totalement différent. Un personnage de 60 cm sans le socle me semble un grand maximum pour garder l’effet monde en miniature qui est très séduisant. Je n’ai pas le souhait de travailler plus grand. J’ai toutefois récemment réalisé des coiffes pour l’association la Tuatha de Brocéliande, dont je fais partie, c’est une asso d’artistes et d’artisans qui partage un même univers, des références artistiques communes et surtout un souci d’excellence dans le travail qui nous motive tous au quotidien dans nos boulots respectifs. « A cœur vaillant rien d’impossible » pourrait-être notre devise, nous sommes tous un peu fous et très excessifs dans nos travaux, jusqu’au-boutistes et surtout de redoutables perfectionnistes, totalement impitoyables avec nous-mêmes et avec les autres aussi. Ce côté élitiste et ces valeurs ne sont pas populaires de nos jours, car on ne cesse d’enseigner dans nos sociétés depuis des décennies que tout se vaut, mais c’est ce qui nous fait vivre et nous ne pouvons pas concevoir nos vies ni notre travail autrement. La Tuatha devait intervenir lors du Grand Spectacle du château de Comper, et nous avions en charge le camp de l’Autre Monde. Tout le monde s’y est mis et le résultat de notre travail en un mois et demi est assez révélateur de ce qui nous habite, j’ai aidé à réaliser les coiffes, j’ai eu en charge la coiffe de la Reine de l’Autre monde notamment. C’était vraiment un plaisir formidable, et faire quelque chose de portable sans trop de douleurs pour une tête humaine et dans les proportions proches de ce que je peux faire habituellement sur mes pièces était un challenge enivrant. J’ai eu carte blanche et une confiance totale tant technique qu’artistique de l’ensemble de la Tuatha, c’était vraiment le pied. Nous nous connaissons tous très bien et nous respectons tous le travail et les connaissances de chacun, c’est un milieu très enrichissant, il y a beaucoup d’amitié et d’émulation entre nous tous.


Vos sculptures incarnent l’animal, le végétal, ou encore sont d’inspiration fantastique. Pouvez-vous expliquer pourquoi cet attrait pour « l’informulé » ?

Le fantastique est vraiment le biais que je préfère, au sens premier du fantastique, c’est-à-dire l’intrusion dans un univers bien réel et terre à terre parfois, de quelque chose d’étrange ou de surnaturel, qui va changer notre approche, notre vision du monde. L’animal, le végétal sont pour moi tout aussi étranges et séduisants qu’un fantôme, une histoire de vampire, etc … voire plus. Je manipule ces éléments pour leur aspect esthétique en premier lieu, parce que je trouve tout ça beau. Mais je pense aussi que le fantastique est un très bon biais pour parler de nous, de ce qui est important dans nos vies, la vie, la mort, le danger, la peur, la fascination, la manipulation, pour moi ces choses sont fondamentales de notre fonctionnement et du fonctionnement de nos structures, familiales et sociales, la peur de la mort est un très bel exemple. La majorité des gens ne veulent pas en entendre parler, car c’est un sujet difficile et très intime, pourtant nous partageons tous cette peur et nous passons notre vie à construire des modèles pour essayer de la gérer. La femme, et par extension la féminité, ou le principe féminin, a un rôle primordial pour moi dans cette relation à la vie et à la mort surtout, l’ambivalence de la femme est fondatrice de la plupart de nos cultures, que cette ambivalence soit cachée, niée, ou sublimée. Cela m’a toujours fascinée ; ce qui m’attire ce n’est pas la femme dans son aspect pour moi le plus trivial, la mère, ce qui m’attire c’est la féminité comme principe fort et souverain, n’ayant pas besoin de se reproduire, la femme comme être surhumain. Beaucoup de gens voient en mes personnages féminins des formes de déesses ou de reines, mais je parle avant tout de chaque femme, de ce que nous avons de souverain en chacune de nous, de libre et de fort, voire de destructeur. Pour moi, chaque femme est avant tout un monstre superbe dont la nature profonde est forcément unique et indomptable, c’est cette idée qui est le fil conducteur de tout ce que je peux faire, c’est une image de la femme que je chéris profondément. Les éléments naturels m’aident beaucoup à jouer et à sublimer cet aspect.

Morrigan, 83 cm

Camille Rose Garcia a récemment dit dans une interview pour le magazine Juxtapoz : « le Fil conducteur de mon travail est notre relation à la nature, notre inadaptation au monde ». Partagez-vous cette démarche ? De quel monde voudriez-vous vous échapper ?

Finalement j’en parle un peu dans la question précédente. Je n’y ai jamais vraiment réfléchi, mais si je me pose la question, là maintenant, je dirais que je ne me retrouve pas dans l’idée de m’échapper de quelque chose, je ne fais pas ce que je fais pour aller mieux ou soigner un mal être, je cherche plutôt à montrer par un biais qui me plaît une vision des choses à laquelle je crois, au-delà d’un constat. Je pense que nos sociétés ne cherchent justement qu’à « échapper » toujours à quelque chose. Échapper à la mort, à la souffrance, à la solitude, à la peine, à la perte, à l’abandon, au fait que nous ne valons pas mieux que n’importe quel autre animal ou insecte sur cette terre, etc… Mais ça ne marche pas, et ça ne marchera jamais, car la vie humaine est rythmée par cela, qu’on le veuille ou non. Ces peurs et ces angoisses sont terriblement et constamment présentes, et poussent nos sociétés, depuis tout temps, à nous rendre justement inadaptés au monde, en nous éloignant des questions fondamentales et d’une certaine froideur nécessaire pour pouvoir avancer sans peur justement. En créant des cellules familiales écrasantes et destructrices, des liens fictifs, factices, aliénants, imposés comme modèles pour tenter de palier à la peur de la mort de l’abandon et de la solitude, des sociétés et des gouvernements qui font de même, un commerce qui ne marche qu’à la peur de perdre, etc… Je pense au contraire que si chacun avait cette forme de courage très rare, de vouloir voir clairement, froidement les choses, nous serions finalement libérés de beaucoup de nos angoisses et de nos douleurs d’êtres humains, et nous pourrions commencer à vivre et à partager des choses véritablement entre nous sans craindre l’avenir ou de simples spectres sociétaux. Nous naissons et nous mourrons seuls et sans rien, nous avons la vie, la vie ne s’achète pas, ne se gagne pas, elle est là, nous sommes des animaux ; une fois qu’on a bien intégré cela dans sa propre vie et qu’on arrive au point de ne plus en avoir peur, il ne reste plus qu’à profiter de la vie. Nous sommes très adaptés au contraire, naturellement, les sociétés humaines devraient juste utiliser leur intelligence pour poursuivre cette adaptation et ne pas rendre les gens inaptes par la peur et par la glorification de valeurs factices. Malheureusement nous construisons nos sociétés sur des peurs et des valeurs qui n’ont pas lieu d’être. A la réflexion, à l’éducation, au libre-arbitre, on préfère systématiquement le contrôle par l’abrutissement des masses. De là, si l’avenir c’est d’aller dans le mur, on ira, je pense que ça sera un juste et naturel retour des choses, comme à chaque fois. 

Witchcraft, 50 cm

Un de vos nombreux points forts est de réunir tout un univers dans un seul personnage. Le personnage EST son monde, le décor le pénètre, lui-même devient paysage. L’inerte et l’organique s’entrecroisent, nature et humanité ne font qu’un. Pourriez-vous nous expliquer votre vision ?

Mes réponses précédentes parlent un peu cela je pense. Je conçois mes pièces comme un tout cohérent, je n’imagine pas vraiment de décor autour, je cherche à ce que les pièces se suffisent à elles-mêmes, ensuite le spectateur est libre de tout inventer autour s’il le souhaite, un décor, une histoire, d’autres protagonistes. Je n’ai pas le sentiment de raconter une histoire, mais il semble qu’elle se construit malgré moi, cependant je cherche surtout la cohérence graphique dans mes pièces. C’est, je pense, ce qui donne cette idée d’un monde fini, et d’une histoire possible ou sous-jacente. Je cherche avant tout une vision qui me plaise, qui me charme, quelque chose qui m’aurait scotchée étant enfant, c’est important ça : le fait de se faire plaisir à soi enfant.


Vous avez entamé la magnifique série Acanthophis, ou vipères de la mort. Comment a-t-elle démarré ? Pourquoi ce thème ?

Cette série a été commencée par hasard, j’avais besoin de trouver un nom pour une pièce que je venais de finir. Comme souvent, j’ai cherché dans les noms latins de plantes ou d’animaux, souvent il y a des choses qui sonnent très bien et me font souvent rêver. J’ai un livre sur les serpents et comme la pièce finie était dans une atmosphère assez dangereuse, j’ai regardé dans le bouquin et j’y ai trouvé cette famille de serpents, les vipères de la mort, c’était déjà tout un programme en soi pour moi et j’ai pensé que ça collerait parfaitement à ma pièce. Maintenant j’utilise ce nom générique pour mes personnages féminins les plus débridés, des femmes fatales et dangereuses qui s’imposent.

Acanthopis III

Vous venez de remporter votre deuxième Gold Award aux Spectrum Fantastic Art Live avec « Acanthophis III ». (« Jack » était le premier, pièce créée en collaboration avec l’artiste Brom). Arrivez-vous à redescendre de votre nuage ?

Oui très vite ! Participer à Spectrum est très important pour moi, cette communauté d’artistes et de gens m’a accueillie à bras ouverts, et cela est vraiment très précieux pour moi. Les 3 Awards que j’ai reçus, c’est la cerise sur le gâteau, mais ce qui compte vraiment c’est autre chose. Beaucoup de gens suivent mon travail aux Etats-Unis depuis des années et, je ne vais pas le cacher, ce public est vraiment important pour moi, car c’est aussi celui qui me fait manger et qui paye ma maison depuis des années ; en 2010, 100 % de mes ventes était américaines, ce n’est pas la France ni les Français malheureusement qui me font vraiment vivre, ni même les Européens, et ce, même avant la crise. Je pense que c’est une question de culture. Aux Etats-Unis, je n’ai pas à expliquer ce que je fais, à expliquer ce que les gens ont devant les yeux, pour pouvoir ensuite me mettre dans une petite boîte avec une étiquette, les Français ont besoin de cela, de vous mettre dans une case pour donner de la valeur même minime à votre travail. Et c’est pire de la part des galeristes et des professionnels de la diffusion, s'ils ne savent pas ce que vous faites, vous situer par rapport à un sculpteur sur bois par exemple, vous n’existez tout simplement pas. Heureusement pour moi, il y a des gens plus ouverts ailleurs. Mais c’est tout de même dommage, car beaucoup de gens en France aiment mon boulot et voudraient le voir, mais ils ne le verront vraisemblablement jamais, sauf si les mentalités changent et si les Français s’ouvrent à autre chose qu’à ce qu’ils connaissent déjà. Je n’ai pas exposé depuis 3 ans dans mon pays sauf au château de Comper, tout près d’ici … Même après avoir exposé à Paris, aujourd’hui plus rien, et le monde parisien se referme totalement sur lui-même depuis quelques années, c’est toujours les mêmes dans les mêmes endroits, pour le même public. Nous sommes beaucoup à devoir nous expatrier virtuellement pour le boulot seulement et il n’y a pas photo entre ce qu’on nous propose ici et ce qu’on nous propose là-bas. Ici je ne suis rien, là-bas des gens traversent deux états en voiture, font louper l’école à leurs enfants, juste pour parler avec moi dix minutes, c’est un vrai choc pour moi et je suis extrêmement touchée de cela, c’est quelque chose d’inimaginable ici. Alors faire l’effort d’aller à la rencontre de ce public d’Outre-Atlantique une fois par an me semble primordial, et la moindre des choses. Je vais là où on me fait une place et où mon travail est vraiment reconnu, ça me semble logique, je ne vais pas me battre contre des gens qui s’en foutent totalement ou n’y comprennent rien, et qui ne font même pas l’effort de montrer nos boulots, pour seulement prendre le risque qu’ils se vendent, quel risque !

En collaboration avec Brom, Golden Award, Spectrum Fantastic Art 2012

Vous avez collaboré avec David Thiérrée, Jean-Sébastien Rossbach, Olivier Ledroit, Barbara Canepa, Brom. D’autres projets collectifs en cours ?

J’aime vraiment faire ce genre de boulot de temps à autre, c’est surtout parce que je suis fan de leur travail et nous nous retrouvons sur certaines choses, les mêmes références artistiques, les mêmes goûts, et c’est assez trippant de se glisser dans des univers et des personnages créés par d’autres. Il faut juste que je sois super motivée pour donner le meilleur, c’est pour ça que je ne fais pas ça à la demande, il faut que le boulot des autres résonne en moi et que je sois vraiment admirative, il faut que j’y trouve un challenge aussi. Cela fait des années que nous parlons de faire une pièce avec Andy Brase, dessinateur américain de très grand talent, ce type est un fou, ses dessins sont magnifiques, et j’espère que nous allons trouver le temps de faire ça dans les deux ans qui viennent. Nous avons aussi plusieurs fois parlé de collaborer encore avec Brom, mais sans doute d’une autre manière, plus dans un véritable échange, on va voir.

Claudia, en collaboration avec Olivier Ledroit pour Requiem, Vampire Knight

La Crapaudine, c’est le nom de la boutique que vous partagez à La Gacilly avec David Thiérrée. Que peut-on y trouver ?

Oui nous avons ouvert en 2012. La Crapaudine était le nom de mon atelier ouvert au public, qui était situé à un autre endroit de La Gacilly entre 2005 et 2008. David Thiérrée voulait ré-ouvrir un atelier pour y travailler et avoir un coin boutique, nous avons donc ressuscité La Crapaudine en 2012. C’est l’atelier de David, il y travaille devant les gens, j’ai quant à moi gardé mon atelier chez moi, j’y suis plus tranquille. Nous y présentons essentiellement les travaux de David, des originaux et des repros, des cartes postales et d’autres choses qui ne sont disponibles que là, lorsque c’est possible j’y expose quelques pièces. Mais nous allons sans doute fermer définitivement La Crapaudine vers la fin de l’année. Les charges étant trop lourdes, et l’argent que nous gagnons ailleurs sert à entretenir ce lieu qui ne rapporte rien, ou pas grand-chose. Nous avons beaucoup de visiteurs, beaucoup de compliments, des tombereaux d’encouragements, mais c’est difficile de payer des factures avec tout ça. Les gens ne comprennent pas toujours qu’acheter quelque chose à un artiste ou à un artisan c’est avant tout lui permettre de continuer son activité. Si tous les gens aimant notre travail avaient le réflexe de nous acheter une carte postale à 1 euro… Il y a des choses à changer dans ce pays pour que les gens cessent de penser que tous les artistes et les artisans sont soit payés pour faire de l’animation dans les petits villages comme La Gacilly, soit subventionnés par les collectivités ou l’Etat, ou que le plaisir de faire suffit ! Ensuite ce sont les premiers à déplorer la fermeture des ateliers ou des boutiques et la perte du savoir-faire. Mais fermer La Crapaudine ne veux pas dire que nous allons arrêter notre activité, au contraire, nous allons mettre à profit ce temps retrouvé et cet argent aussi pour mettre en place d’autres choses et renforcer notre activité.

Lurking in the Woods

Auriez-vous la gentillesse de nous décrire votre atelier ?

Comme je le disais je travaille chez moi, une pièce qui était à l’origine une grande chambre d’amis y est dédiée. De l’avis de beaucoup, mon atelier est assez bien rangé, sauf quand je finis une pièce, c’est souvent le bordel. Une fois qu’un boulot est terminé, je range tout. Il y a mon ordinateur, de quoi écouter de la musique dans de bonnes conditions, des livres et vraiment tout un tas de trucs, les meubles sont un assemblage de plein de choses, je me fous un peu de l’aspect de tout ça, il faut que je m’y sente bien, et qu’il y fasse chaud et sec, surtout en hiver. Je travaille assise mais je suis aussi souvent debout, car ma table est très haute, c’est dynamique d’être debout et je soupire beaucoup lorsque je suis à fond dans le boulot. J’ai une autre pièce pour les tissus et tous les produits d’emballage qui prennent beaucoup de place. Il y a toujours un coin près de moi pour mon chat, qui respecte scrupuleusement ma table de travail, pas de risque d’accident donc. Je travaille face à un mur, j’y ai accroché des choses, des boulots d’amis ou d’artistes ou d’illustrateurs que j’admire. Les murs vides me dérangent en général, donc il y a beaucoup de choses aux murs, j’aime que le regard passe d’une chose à l’autre, c’est un peu comme en voiture, l’esprit et l’imagination marchent mieux lorsque le paysage défile, alors finalement mes murs sont peut-être un peu comme un paysage.

* * * 


After eight months of hibernation, here I am AGAIN, with an interview about which I deeply care.
Of a star of sculpture.
Of Virginie Ropars.
Of a fantastic feminity.

This Brittany artist with golden fingers carves characters between roots and wings, nerve and vertigo, in unison with a forgotten Nature. Like a dress designer, she points out materials, volumes and movements, invokes and evokes an art that is raw, free and hyper-sensitive.

Help yourself with a glass of mead, your laptop and enjoy this beautiful and long interview.

Waterfall, 88 cm

Your characters look so real that one wonders if they're not about to move. How do you reach such a realism? Does it come from specific studies or rather from an autodidact and open-minded observation of life?
Sculpture wasn't my main course in scholarship. I had had no chance to experiment other materials than clay, which I disliked. Actually, drawing was a bigger source of interest to me, but even in that field, I kept focusing on expressions and on the tiny very details that make the difference and that have a more subtle and ambivalent rendering. It may appear to be insignificant things, but I like fastness of reaction, like with the polymer clay that I use to model faces. From a slight touch on the forehead, anything can happen. When I'm modelling a face, even at the core of construction, I'm paying much attention to what it wants to tell me. Even when I'm convinced about the expression I want to convey, I always let room to surprise, which sometimes conducts to a more efficient work. One must learn to go with the flow. It's like facing a mirror and stepping back so as to imagine that the reflection is not yours but someone else's that you can feel inside you. My small heads are never fortuitous, as I always try to inject a soul in them, to have them intend. They're the opposite of transitional objects like dolls, which are often empty receptacles for ourselves. And that's exactly what can sometimes be disturbing in my works, especially with some doll collectors: there's no room for oneself. My characters are meant to give a certain expression at a time, and I think that's the reason for which the very people that are afraid of dolls or clowns don't fear my sculptures. My characters don't hold that scary empty void inside them.

Special work for Spectrum Fantastic Art Live 2, 30cm

At the time, when you were working on 3D and drawing, did you already feel that they wouldn't satisfy you? What did you need that these tools hadn't?
I reckon I craved touching real materials, playing with them, which you unfortunately can't afford with drawing and 3D modelling. And it's so enthusiastic and fulfilling to give life to an object! It's what I missed most in drawing (that I love nonetheless). Even though other people's works give me energy to pursue mine, I've never felt totally at ease with a pencil and a sheet of paper. It's a simple matter of language, or of the right tool to use. Fabrics, objects, jewels and knickknacks have always fascinated me for the reason I feel at ease with them and that I can master these tangible things to reach my goals. Merging many different things and making them as a whole is what I like the most.

Going back to your childhood, what do you think progressively influenced you to the point of bringing about a revolution in the sculpture world?
I wouldn't know how to answer that question, and I certainly don't think that I brought about any revolution. I didn't invent anything. I might have driven certain technical aspects a little bit further, but nothing more. If at all, it's not a thing I'm sure about. My childhood gave me a strong taste for wonders and imagination, for vintage aesthetics, for rich, almost overloaded things, for the combination of textures and colours, for precious, dramatic, elegant and elaborate stories. They were here right from the start, they built me and still are. Without them, I wouldn't be who I am and I wouldn't do what I do.

Shepherd of the Monsters, 86 cm

Anything can be an source of inspiration to you, be it a book, a wood or a light. But how do you turn them into characters? How do you come to imagine them, what do they represent to you?
Imagination is a mystery, and it's a good thing that it should remain so. In fact, I try not to be pushy and to let myself go with the flow. It's like a wedding cake, in that the details are progressively added to the initial trigger, colour or shape. It's like a child playing, when things are gradually improvised and fancied, for the simple reason that it seems appropriate or coherent with what is being played at the moment. Ideas colliding within the mind, that's the thrill. Above all, my characters represent a special moment of work and enjoyment, of what is to come next. I never linger over what's already been done and I neither hold them back. I like watching them depart and the idea that, once the work is done, they'll live their own lives. They're not my children, nor even bits of me. That a creation should progress over a life time is an attractive idea to me. That's the reason for which I don't get attached to my works. If I did, it would get nowhere and I would have nothing to tell or to give. To me, that's a very narcissistic attitude. That doesn't mean that I forget about them when they're done, I remain behind them in case a problem would occur, or something had to be dealt with, that's it.

Do you remember your very first sculpture? Where is it at the moment?
My first sculpture, of the same style as I'm doing now, dates back to November 2003. So it's just been 10 years old. I never stopped since then. This work is quite ugly if compared to what I achieve today, but at the time, I was happy with the result. But I also guessed, from the very start, the infinite potential that it offered, the room for technical improvement that it let, if I cared to go on. I sensed that the artistic and technical aspects wouldn't get me bored before a long time, as they allowed a permanent evolution. Indeed, I still haven't explored all the possibilities and am still as enthusiastic as before when I start a new sculpture. The very first one is at my place. I never show it, but I know it's there. All my first creations are either at my home or at my parents' place. As they're not technically relevant or very stable, and because I was testing many different things at that time _ especially about internal structure _ I haven't sold them.

Once a sculpture is done, do you feel heightened, increased, emptied?
I would rather say that some of my works are satisfying when I think I've somehow improved and that I've made technical progress, while other people can't necessarily see it. But I'm glad to know that the technical progress I've made will provide me with future possibilities. I'm often glad when a sculpture is done, because the next one is already at work in my mind, which results to less interest for the one I'm completing. So I'd rather work in one fell swoop for 3 or 4 weeks. There are also compelled breaks when I have to leave or to do something else, which I much dislike. But I nonetheless need a small period between each sculpture. It's necessary to clean the workshop as well as the mind, to read, to feed on other things, to seriously prepare what will come next...
Epeira Diademata, 30 cm

It may take years to reunite the pieces of an unconscious puzzle. When that's the case, aren't the 3 or 4 weeks of the making too long?
Not really. I wouldn't and couldn't spend less time on my creations. Usually, things segue into one other. I try to keep things flowing. It's easy and enjoyable when a work has been thought about upstream, even for a long time. When I work, I'm not in a creation process anymore, but in the phase of realisation and of playing with materials. That the sculpture was long to conceive doesn't change the game once the work starts. I do care about this essential notion of pleasure and game while I'm working. It's the only way for me to get things successfully achieved and that make sense. If I fight for something that is not 100% satisfying, it means that it's not the right moment to do it, and that the work is not good. That's exactly the reason for which I never accept orders. They would tire me, I would give less of myself or that would lead to a lesser quality. Nobody would be satisfied, neither the customer nor me. That'd be fantastic if people were aware of that when they ask something to an artist. Technical mastering is not all. For the work to be good, one must be 100% motivated, be into it and above all enjoy oneself. A creation is better and stronger when the artist is having fun, nobody can deny that. Unfortunately, the ones who place orders don't often understand that, and they tend to see the artist as a pair of hands and a brain, a crafts person whose universe they fantasize on through the creations they happen to know. But if a work of art is to move you, it requires that the artist should be feeling it, and entirely dedicated to it. The artist can't let go personal things, meaningful things, if the idea, the vision or the needs are not his or hers. Work must be nourishing and heightening, it's a permanent exchange between one self and the work that is being made.
Melusine, 62 cm

Do you define a maximum height for your sculptures? Will you one day create one at human scale?
As a matter of fact, their height was not my decision. It was simply a given. I can feel I'm satisfied when my fingers are happy at work. In the past, I happened to create slightly taller sculptures (not much, 1 or 1,5 cm taller), but this additional surface was of no use, it brought nothing more to the face. With time, I realised that there's a critical height that modifies the relationship with the object inside one's brain. The effect is different and the settling of the gaze changes when people watch my 50/60 cm sculptures or the 1 m ones. A 60 cm tall character, without the stand, is a max to keep that attractive miniature world effect. I wish not to work on a bigger scale. Nonetheless, I've recently made headdresses for La Thuatha structure, which I'm a member of. They're an organization of artists and craftspersons who share the same universe, the same artistic references and, above all, a sake of excellency that is challenging to us. “Faint heart never won fair lady” could be our motto. All of us are a bit nuts and excessive, perfectionist hard-liners, pitiless with ourselves and with other people as well. Nowadays, these elitist values aren't popular, because it's been decades that our societies have taught us that everything is alike. But we can't conceive neither our lives nor our artworks like that. La Thuata was to be part of le Grand Spectacle for the Château de Comper. We had in charge the Autre Monde camp. Everyone knuckled down to it, and the result of one-month and a half work is quite revealing of what motivates us. I helped realizing the headdresses, among which the Queen of the Other World. To be able to create a headdress that would not be too heavy nor painful for a human head, while staying close to my average proportions was such a thrilling challenge! I was given free rein and total trust, as much technical as artistic, from La Thuata, and that was really exciting. We all know each other very well and we respect one another's work and knowledge. This milieu is very rewarding, there's much friendship and emulation between us.

Your sculptures are of fantastic inspiration, they incarnate the animal and the vegetal worlds. Why this attraction to the “unformulated”?
The Fantastic is my favourite thing ever, in the original sense. When something strange or supernatural gets into a real and down to earth universe, our approach and vision of the surroundings changes. To me, the animal and the vegetal worlds are as weird and attractive as a ghost or a vampire story. Maybe even more. First of all, I manipulate these elements for their aesthetic aspect, because they're beautiful. But I also think that the Fantastic is a perfect way to talk about ourselves, about what is important in our lives, life, death, danger, fascination, manipulation. To me, these are fundamental aspects of our behaviour and of our familial and social structures, among which death is a good example. While most people don't want to hear about this hard intimate matter, we all share this fear and we spend our lives building patterns to try and deal with it. Women, and by extension femininity or the feminine principle, have an essential role in my handling this connection to life and death. Whether the ambivalence of women be hidden, denied or enhanced, one can't deny they're a founding part of most societies. This has always fascinated me. What attracts me isn't the woman in her most trivial aspect, like her being a mother. What really appeals to me is femininity as a strong and sovereign principle, a woman who needs not reproduction, the woman as a superhuman being . Many people see my feminine characters as goddesses or queens, but I firstly speak about each and every woman, about their sovereignty, their freedom, their strength, if not their destructive part. To me, woman is a superb beast, whose inner nature is bound to be unique and indomitable. My whole work is based upon that, it's a representation of woman that I deeply cherish. The natural elements help me a lot to play and exalt this aspect.
Morrigan, 83 cm

In quite a recent interview for the Juxtapoz magazine, Camille Rose Garcia asserted that the central theme of her work is our relationship with Nature and our incapability to adapt to the world. Do you share this statement? What world would you like to escape from?
In fact, I partly answered the question previously. I never really thought about that, but now that I do, I'd say I know I don't try to escape from anything. I don't do what I do to feel better or to soothe any pain. It's more like showing my point of view on things, through a media I like, rather that a review or an analysis. I think our societies keep on trying to escape from something, be it death, pain, loneliness, sorrow, loss, abandonment... We try and forget that we're nothing more than animals or insects on this planet. But it doesn't and won't work that way, because it's a whole we're in rhythm with, and nothing can be done about it. Precisely because of these dreadful and constant fears, we've become unadapted to what surrounds us. We've disconnected ourselves from fundamental matters and from a kind of indifference that would help us move forward without fear. Overwhelming and destructive familial units, fictitious, artificial and alienating bounds are being imposed upon us as models, so we avoid thinking about death, abandonment or loneliness. We've built societies, governments and companies whose leitmotiv is to not lose... On the contrary, if each of us had the rare courage to be willing to see things clearly and coolly, we'd eventually be released from most of our human anguish and suffering. We'd be able to start and live truly, to share sincerely, without the fear of the future. We wouldn't be social spectres anymore. We were born and will die alone and bare. We've got one life, it's not to be bought, it's not to be earned. It's simply there. Once we've integrated that we're animals, and when you're not scared anymore by this fact, all you have left is to make the most of life. Instead of making people unadapted by the use of fear and fake values, human societies should use their intelligence to continue our adaptation. Unfortunately, instead of relying on reflection, education and free-will, we build civilisations upon fears and values that shouldn't be, we take control by mind-numbing the masses. From that point of view, if our future is heading for disaster, we surely will. Like every time, it'll be a fair reward.
Witchcraft, 50 cm

One of your many strong points is your being able to condense a whole world into a single character. The character IS its surroundings. The scenery penetrates it as it penetrates the scenery.
My previous answers have already answered some of it. I devise my works as a whole, with no surroundings, I try and make self-sufficient pieces, so people is free to invent whatever he wants from that. He may imagine a scenery, a story, other characters. I don't feel I'm a story-teller, the stories construct themselves without me. What I look for is graphic coherence. I think that's what gives this idea of a finite world, of potential or underlying tales. I seek a vision that will seduce me, that would have bewildered me as a child. That is very important: to please the child in us.

You've started the beautiful series Acanthopis, or death vipers. What was the starting point? Why choose that theme?
This series started by pure chance. I needed a name for a piece I had just finished and, as usual, I searched Latin names of plants and animals. Most of the times, the things you find there sound very good and make me dream. I own a book about snakes, and as there was a feeling of danger in my finished sculpture, I rummaged in that book and found this snake family, the death vipers. That was already something and I thought it would perfectly match my work. Since then, I use this generic word for my most unbridled female characters, these femmes fatales who are dangerous and impose themselves.
Acanthopis III

You won your second award at the Spectrum Fantastic Art Live with Acanthopis III. (Jack was the first award you got, the work was in collaboration with the artist Brom. Have you got down from a cloud?
I have, and very quickly! Being part of Spectrum is very important and precious to me. Not only because their community welcomed me with open arms, and that the 3 awards I received were the icing on the cake. It's also the fact that, for years, my work has been attracting many followers in the US. I won't hide it, they're the ones who provide for me, it's their money I live on. In 2010, 100% of my sales were American. Even before our economic crisis, the French and the European never made me earn a living. I think it's a matter of culture. In the US, I never have to explain myself and people don't lock me up in a box, which French people love doing, especially on the part of art dealers and broadcasting professionals. If they don't know you and can't compare you to, say, a wood carver, you simply don't exist. It's a pity, many people in France love my work and are eager to see it, but they won't unless mentalities change. It's been 3 years I haven't exhibited in my own country (except at le Château de Comper). Nothing remains of my exhibitions in Paris, years ago. The Parisian cultural sphere has cut itself off, the same things are shown to the same people in the same places. Many of us French artists have had to virtually expatriate ourselves. Here: I'm no-one. There: People cross 2 states by car and have their children miss school, for the simple purpose to talk to me for 10 minutes! It's a real shock to me, it's so moving and imaginable here. That's why meeting once a year this audience across the Atlantic is essential to me, and the least I can do. It seems logical to me to go where a room is made for me, where my work is acknowledged. I wouldn't do that for people who don't give a damn and understand nothing, and who don't even try to show our works because they fear they won't got sold. What a risk!
In collaboration with Brom, Golden Award, Spectrum Fantastic Art 2012

You collaborated with David Thiérrée, Jean-Sébastien Rossbach, Olivier Ledroit, Barbara Canepa, Brom. Any other collective projects in course?
I like this kind of work, from time to time. Especially because I'm a big fan of their works and that we manage to meet somewhere in-between. We share the same artistic references, the same tastes. It's thrilling to enter other people's worlds and characters. All it requires is a big motivation so I can give my best. I can't do that on request or if I don't admire them. Their creations must resound inside me. There also has to be a challenge. It's been years we've been talking about a common piece with Andy Brase, a highly talented American drawer. This man is possessed and creates magnificent drawings. I hope we'll find a moment to collaborate within 2 years time. As far as Brom is concerned, we also talk about a common work, but in a different apprehension, more into a real exchange. We'll see.
Claudia, in collaboration awith Olivier Ledroit pour Requiem, Vampire Knight

La Crapaudine is the shop you own with David Thiérrée at La Gacilly. What can one find there?
The shop opened in 2012. La Crapaudine was the former name of my public workshop at La Gacilly, which I owned between 2005 and 2008. As David missed his workshop with a side shop, we brought La Crapaudine back to life. It's his workshop now, while mine is still at my house. He likes to work in front of customers. The things on display are mostly David's creations, original artworks and reproductions, which can only be found there. I exhibit some artworks of mine when I can. But there's always the danger of closing it down. This shop yields no profit. We receive many compliments and encouragements from numerous customers, but that's not enough to pay the rent. People don't always understand that buying artists or craftsmen something allows them to keep on creating. There's this persistent idea that artists make a living with animations in villages or that they get subventions from the State, or again that the pleasure to create is enough. The same people cry when workshops and shops close, and they deplore the loss of craftsmanship. But closing down La Crapaudine wouldn't mean stopping pour activities, we would use the regained time and money to construct other things and reinforce our work.
Lurking in the Woods

Would you be so kind as to describe the inside of your workshop?

As I said, I work at my place. The room was originally a big guest room. To many, it's rather tidy, except when I've just finished an artwork! There's a computer, something to listen to good music, books and many other stuff. The furniture is a mixture of many things. I don't care about the appearance of the room, all I need is to feel good in it, and it to be warm and dry in winter. As my table is very high, I seat as much as I stand, which is very dynamic. There's another room for materials and wrapping papers, which are voluminous. A corner next to me is preserved for my cat, who strictly respects my working table and doesn't make any mess. Facing me is a wall where I've hanged friends' artworks that I admire. Void walls always creep me, so I've filled them out so my gaze can run from one to an other. It's like when you're driving, the landscape moves before your eyes and helps your mind and your imagination wander. Eventually, my walls may be a landscape.

mercredi 23 octobre 2013

Dorianne Wotton et Insousciance. Une exposition : NOIR






Pas de femmes fatales.
Des papillons naphtalènes,
Des mantes religieuses,
Des solitaires à la Woolf qui se livrent et se délivrent, se battent et se débattent,
Dans l'in-sollicitude, dans les phares dans la nuit.

L'indécence n'est pas dans la nudité ; elle suinte dans la lumière crue qui saisit, révèle et accuse.
Pas le modèle, non. Nous, notre regard, notre indiscrétion.
Dorianne Wotton et Insousciance entrouvent la porte de chambres capitonnées, où leurs modèles posent et reposent, s'opposent sans jamais s'adonner à nos jeux.
Elles dictent, hypnotiques et hurlantes, leur rage et leur fragilité.
Éblouissantes et sombres.

Texte d'Oriane G.

Une exposition à ne pas manquer !

mardi 17 septembre 2013

APOCALYPSE COW / Michael Logan



Ça commence avec une vache qui ne veut décidément pas mourir. 
Puis ça devient une épidémie qui transforme le bétail de Grande-Bretagne en une horde de zombies à quatre pattes, éternuant, salivant, et affamés de chair. 
Et si ce n'était pas suffisant, le destin de la nation semble reposer sur les épaules de trois héros improbables : un employé d'abattoir dont la vie amoureuse est inexistante grâce à l'odeur de mort qui lui colle à la peau, un adolescent végétarien souffrant d'eczéma et d'un drôle de petit faible pour sa professeure de maths, et une journaliste inepte qui ne reconnaîtrait pas un scoop même si elle trébuchait dessus.
Tandis que le pays sombre dans le chaos, peuvent-ils réunir leurs ressources, libérer un vaccin 
et sauver le monde ?
Trois loosers. Des probabilités innombrables. Une seule issue.
Ouais, on est déjà accros.

Pour son premier roman Apocalypse Cow, Michael Logan a reçu le prix Terry Pratchett "Anywhere But Here, Anywhen But Now".
Après avoir rédigé des milliers d'articles pour The Sunday Herald, The Budapest Times,Woman, Travel Mag (et j'en passe), ce journaliste est aujourd'hui basé à Nairobi, Kenya.

Il a gentiment accepté mon interview.
La voici donc pour vous.
Attention, peinture fraîche !


Comment vous est venue l’idée d’écrire un roman, certes sur les zombies, mais surtout sur des vaches zombies ?  Est-ce à cause des nombreux scandales de la viande ?

En fait, j’ai commencé la rédaction de ce roman en 2006, comme une sorte d’exercice. L’écriture a toujours été pour moi un échappatoire. Je ne trouve rien de plus satisfaisant que d’inventer des personnes et des univers, et mes personnages sont pour moi des gens réels. Auparavant, je m’étais concentré sur des nouvelles, pour une quantité de raisons avec lesquelles je ne vais pas vous ennuyer, mais un jour j’ai su qu’il était temps que je passe au format du roman.  Si j’ai choisi le thème des vaches zombies, c’est surtout parce que je suis un fan du genre zombies, et que je voulais en faire quelque chose de différent.
Je voulais aussi rompre avec le sérieux qui a toujours caractérisé mes écrits.
Mais j’ai aussi été influencé par  le fait que, virtuellement, chaque pandémie que l’on nous a annoncé aurait dû éradiquer la race humaine, en commençant par celle provenant du bétail : le SRAS, la grippe aviaire, etc. Et bien entendu, la vache folle. J’ai juste poussé le scénario à l’extrême.

Un de vos personnages, Gedolf, est végétarien. Pourquoi inclure une telle personne et la rendre encore plus décalée par un tel contexte ? Est-ce une manière de critiquer les hippies malheureusement démodés, ou plutôt d’établir un contraste avec les cauchemardesques vaches carnivores ?

Etant donné que ce livre traite en grande partie de notre attitude envers les animaux et la viande, il m’apparaissait essentiel d’avoir une famille végétarienne pour contrecarrer les points de vue des carnivores, et ainsi présenter les nombreux arguments que les deux clans s’échangent généralement. Cela me permettait de renforcer l’angle de la « revanche des animaux » et me donnait une occasion de pointer du doigt le fait que, tandis que beaucoup de gens se sentent concernés par les animaux, ce sentiment n’en est pas pour autant réciproque. Je n’ai certainement pas eu l’intention de critiquer les hippies, même s’ils ne sont plus d’actualité. Je me sens bien plus proche dans ce livre de ces environnementalistes hippies que des mangeurs de viande.



Lesley, la journaliste ratée, est-elle un témoignage de ce que vous auriez pu rencontrer lors de votre carrière dans la presse ? Représente-t-elle une course effrénée et incompétente aux nouvelles, et donc une distance fatale entre l’information et la réalité ?

Je n’ai jamais rencontré de journaliste aussi naze que Leslie, bien que certains n’en étaient pas loin. Leslie est d’avantage une critique de notre obligation actuelle de réussite. On nous dit de « réaliser nos rêves », mais la triste vérité est que beaucoup d’entre nous ne sommes absolument pas faits pour le travail de nos rêves. Leslie est une de ces personnes. Je crois vraiment que la presse a des problèmes, particulièrement quand les journalistes sont obligés de couvrir l’histoire que le rédacteur en chef veut publier, au lieu d’une autre qui devrait être racontée. Mais, de manière générale, je ne dirais pas que cette branche de métier est incompétente.

De même, votre roman semble être une critique implacable des gouvernements et des armées. Quelles que soient les limites imposées, les fragilités humaines saboteront toujours la discipline…

Les gens au pouvoir font tout ce qu’ils peuvent pour y rester, et c’est exactement la première réaction du gouvernement dans mon livre : Au lieu de résoudre les problèmes, ils préfèrent cacher leur implication. Leur réaction est assez caractéristique, et elle vaut définitivement la peine d’être critiquée. Et pour en revenir à « la vache folle », je me souviens très bien d’un ministre anglais qui avait forcé ses enfants à manger des hamburgers devant les caméras, pour prouver que le bœuf était sain. C’est exactement cette situation dont j’ai voulu faire une satyre.



Ce qui est frappant dans votre roman, c’est que la plupart de vos personnages ont des choses à cacher, pour ne pas dire une double-vie entre leur moi intime et l’image qu’ils souhaitent donner. N’est-ce pas là une vision assez pessimiste de la race humaine ?

C’est une question intéressante. Qui sommes-nous vraiment ? La personne que nous pensons être  celle que nous voulons être, ou encore celle que nos actions représentent ? Je crois que tous autant que nous sommes avons une image idéalisée de nous-mêmes et de ce dont nous sommes capables, et que nous passons notre vie à nous évertuer à réduire la distance entre perception et réalité. Je ne trouve pas cela pessimiste. Cela montre que tout le monde cherche à s’améliorer.

De plus, les personnages les plus repoussants, incarnés par les troupeaux contaminés, sont justement les plus innocents de l’histoire. On en vient même à les prendre d’avantage en pitié que les autres personnages !

C’est exactement ça. Dès le début, dans les scènes à l’abattoir, j’ai tenu à établir très clairement l’innocence des animaux, malgré le carnage qu’ils causent. Ils n’ont pas les facultés intellectuelles pour pouvoir choisir comment se comporter. Ils ne font que suivre leur instinct. En revanche, les humains ont la possibilité de contrôler leur natures bestiales. Un vrai « méchant » est quelqu’un ou quelque chose qui préfère la voie du mal et qui est conscient des conséquences de ses actions. Par contre, si un tigre arrache une tête, il n’y a là rien de personnel.



Il y a également deux frères dont le père est violent et intolérant. Pourquoi, dans le même temps, les faire aimer par une mère et épouse adorable ?

Ce n’est pas parce que vos enfants sont des petits monstres que vous arrêtez de les aimer. Malgré tous leurs défauts, les jumeaux restent des petits garçons. Ce serait exceptionnel qu’une mère déteste ses enfants s’ils sont turbulents ou brutaux. Quant au père intolérant, je ne pense pas que son épouse l’aime. C’est une de ces situations où votre partenaire fait partie intégrante de la vie que vous avez construite, et où il est plus facile de faire avec que de le quitter.

Comment avez-vous réussi à rendre une histoire sordide en un roman hilarant ? Pourquoi adopter cette approche ?

Toute situation prête à l’humour, même si elle est des plus sinistres.  Combien de fois rit-on de situations horribles ? Néanmoins, j’ai fait très attention à ne pas plaisanter avec la mort. L’humour dans le livre tient aux choses ridicules que les personnages font lorsqu’ils sont face à une situation insensée. Cette approche est juste celle dont j’avais besoin à l’époque. J’ai toujours été une écrivain très sérieux, et je voulais m’essayer à quelque chose d’absurde. Peu d’auteurs osent l’humour, et je comprends pourquoi. C’est une notion tellement personnelle qu’un écrivain qui le tente sait que beaucoup de lecteurs n’accrocheront pas. Pas mal de gens se sont efforcés à trouver ce qu’il y a de marrant dans mon livre, alors que d’autres l’ont trouvé hilarant. Pour un auteur, écrire une comédie est une aventure dangereuse. Je trouve ça dommage qu’il n’y ait pas plus d’humour en littérature. Combien de romans étroits d’esprit refléteraient plus justement l’expérience humaine si leurs personnages se moquaient ici et là du monde qui les entoure !

La fin du roman laisse une porte ouverte. Cela signifie-t-il que vous songez à écrire un second épisode ?

En effet, il y a une suite qui en est pour l’heure à sa troisième ébauche et qui sera terminée d’ici quelques mois. Je voulais étudier le comportement des gens, le choix (que les animaux n’ont pas) qu’ils ont d’ignorer ou de céder au côté bestial qui émane directement de notre cerveau. Dans le second épisode, il y aura des gens qui contiennent leurs appétits, et d’autres qui utiliseront le virus comme une excuse pour s’autoriser les fantasmes les plus sombres.

Êtes-vous, vous-même, un fan de zombies ? Par exemple, suivez-vous la fameuse série Walking Dead ? Quel serait votre film ou roman préféré de ce genre ?

Cela fait des années que je suis fan des zombies, en fait depuis que j’ai vu pour la première fois Dawn of the Dead de Romero, dans les années 80. Il reste encore mon film culte. Le seul livre de zombies que j’ai lu est World War Z, que j’ai beaucoup aimé. Quant à Walking Dead, je ne peux pas dire qu’il m’a transporté comme il a transporté leurs millions de fans. Je suspecte que c’est dû au fait que j’ai vu tellement de films de zombies que je ne vois rien de particulier dans celui-là.



Vous avez donc écrit des nouvelles. De quels thèmes parlaient-elles ? Avaient-elles la même portée humoristique ?

Comme je l’ai dit plus haut, mes nouvelles étaient très sérieuses et littéraires, à l’exception d’une au sujet d’un homme qui est un échec dans la vie, et qui le reste lorsqu’il devient zombie.
Elles étaient centrées sur des rencontres fortuites entre des étrangers, lors desquelles un des personnages, ou les deux, apprend une dure vérité sur lui-même. La plupart d’entre nous vivons dans le confort, entourés d’une famille et d’amis qui ne nous rendent pas capables ou ne nous encouragent pas à l’auto-analyse. Parfois, il n’y a que les étrangers qui puissent nous ouvrir les yeux.

Est-ce que Nairobi, là où vous avez élu résidence, une influence pour vous ?

Cela m’a pris un certain temps pour écrire quoi que ce soit qui se déroule au Kenya. J’ai besoin de temps pour m’habituer à un endroit et le comprendre, pour ensuite seulement écrire à son sujet. Il y a une nouvelle que j’ai rédigée qui est basé sur Nairobi  (http://www.telegraph.co.uk/culture/hay-festival/9535885/Hay-Festival-Nairobi-A-story-by-Michael-Logan.html), et il y aura une scène dans la suite d’Apocalypse Cow qui se déroule dans cette ville.
J’ai également des projets futurs qui seront en relation, donc oui, c’est une influence grandissante.

* * *


It began with a cow that just wouldn't die. It would become an epidemic that transformed Britain's livestock into sneezing, slavering-craving four-legged zombies. And if that wasn't bad enough, the fate of the nation seems to rest on the shoulders of three unlikely heroes: an abattoir worker whose love life is non-existent thnax to the stench of death that clings to him, a teenage vegan with eczema and a weird crush on his maths teacher, and an inept jurnalist who wouldn't recognise a scoop if she tripped over one. As the nation descends into chaos, can they pool their resources, unlock a cure, and save the world? Three losers. Overwhelming odds. One outcome... Yup, we're screwed.

With his first novel Apocalypse Cow, Michael Logan was the joint winner of the Terry Pratchett "Anywhere But Here, Anywhen But Now" prize.
After writing thousands of articles for The Sunday Herald, The Budapest Times,Woman, Travel Mag (and lots more), this journalist now lives in Nairobi, Kenya.

He so kindly accepted my interviewing him.
There it is.
Caution, wet paint!


How come you first thought about writing a novel, indeed about zombies, but most of all about zombie cows? Was it influenced by the many meat scandals?

I started this novel back in 2006 as something of a writing exercise. I had always loved the escape of writing. There is nothing more satisfying for me than creating new people and new worlds, and my characters feel like real people to me. I had focused on short stories before, for a variety of reasons I won’t bore you with, but I knew it was time to move into the novel form. I choose zombie cows largely because I was a fan of the zombie genre and wanted to do something different. I also wanted to break away from the seriousness that had always characterized my writing. A large part of the influence came from the fact that virtually every global pandemic we were promised would wipe out humanity started with animals: SARS, bird flu, etc. And of course, there was Mad Cow disease. I just took this to extremes.

One of your characters, Gedolf, is a vegetarian, like his parents. Why did you choose to include this person and have it made all the more so awkward by such a context? Is it a way to criticize unfortunately out-of-date hippies or rather a way to contrast with the carnivorous nightmarish cows?

As this book was in many ways about our attitudes to animals and meat, I felt it essential to have a vegan family to butt heads with their carnivorous neighbours and thus present a lot of the arguments you hear between such characters. This provided a stronger ‘revenge of the animals’ angle and also gave me the opportunity to highlight that while many people may care strongly about animals, the feeling is on the whole not reciprocated. I certainly didn’t set out to criticize out-of-date hippies. I am far closer to the hippy environmentalist in the book than the meat-eaters.



Is Lesley, a failure of a journalist, a testimony of what you might have experienced during your career? Does she represent an insane, hence incompetent, race for news, a fatal distance between information and reality?

I have never met a journalist quite as rotten as Lesley, although some of them weren’t far off. Lesley is more a commentary on the way, in this day and age, we all feel entitled to succeed. We are all told to ‘follow our dreams’, but the sad truth is many of us are eminently ill-suited to our dream jobs. Lesley is one of these people. I do think journalism has its problems, particularly when journalists are forced to pursue the story an editor wants rather than the story that needs to be told, but on the whole I wouldn’t say the industry is incompetent.

Likewise, your novel seems an implacable criticism of governments and armies... Whatever the boundaries, human frailties will sabotage discipline...

People in power do what they have to do to stay in power, and this is the first reaction of the government in my story: they look to hide their involvement rather than sort the problem out. That is a pretty typical response, and is definitely something worth criticizing. And going back to Mad Cow disease, I strongly recalled a UK Minister force-feeding his children burgers on television to prove that beef was safe, so I wanted to satirize that specifically.



What is striking about your novel is the fact that most of your characters have things to hide, not to say a double life, between their inner self and the image they (want to) convey. Isn't that a quite pessimistic vision of humanity?

This is an interesting question. Who are we truly: the person we think we are or want to be or the person our actions makes us? I think all of us have an idealistic picture of ourselves and what we are capable of, and most of spend our whole lives striving to close this gap between perception and reality. I don’t think it is pessimistic at all. It shows that everybody is looking to better themselves.

Moreover, the most repulsive characters, incarnated by the contaminated herds, also seem to be the most innocent ones, the ones we even come to pity more than we pity the characters!

Well, this is it. From early on, with the scenes in the abattoir, I wanted to make it very clear that animals are the innocents in this despite the carnage they cause. They don’t have the critical faculties to choose how they behave; they always follow their instincts. Humans, however, can choose to override their bestial natures. A truly scary baddy is somebody (or something) who chooses to be evil and is aware of the consequences of his or her actions. If a tiger bites somebody’s head off, there’s nothing personal in it.



There are also two brothers with their violent and intolerant father. Why have them being expressively loved by an adorable mother and spouse?

You don’t stop loving your children just because they can be little monsters. The twins, for all their faults, are just little boys. It’s a rare mother who would hate her children for being rambunctious or bullying. As for the intolerant father, I wouldn’t say she loved him. It’s one of those situations where your partners is such an integral part of the life you have built that it’s easier to put up with such behaviour than walk away.

How did you manage to turn this ultimately sordid story into a hilarious novel? Why adopt this approach?

There is humour in any situation, no matter how grim. Think of how often people laugh and joke as a way of dealing with horrifying situations. I was very careful not to laugh at death, however. The humour in the book comes from the ridiculous things the characters do when thrown into these insane situations. I took this approach simply because it was what I needed at the time. I had always been a very serious writer, and I wanted to have a crack at something absurd. Not enough writers try their hands at humour, and I can understand why. A sense of humour is such a personal thing that any author who tries to write funny knows that it is going to fall flat for a lot of readers. Quite a few people have struggled to see what is funny in my book; others have found it hilarious. This makes writing comedy a dangerous proposition for a writer. I think it’s a shame that we don’t have more humour in books. So many po-faced novels would more accurately reflect the human experience if they had their characters laugh at the world every now and then.

You chose to give to your novel a to-be-continued ending. Does it mean you're thinking about writing a second episode?

I am writing a follow-up, which is now in its third draft and will be done in a few months. I wanted to explore the idea of how people have the choice (that animals don’t) of ignoring or giving in to the bestial urges emanating from the primal chunks of our brain. So, in the follow-up we have people struggling to contain their appetites, and others using the virus as an excuse to indulge their darkest fantasies.

Are you yourself a zombie fan? By example, are you following the trendy Walking Dead series? What would you be your favourite movie or novel in this genre?

I have been a zombie fan for many years, dating back to the first time I saw Romero’s Dawn of the Dead in the early 1980s. This is still my favourite film. The only zombie book I’ve read is World War Z, which I very much enjoyed. As for the Walking Dead, I can’t say it has engaged me in the same way as it has millions of people. I suspect this is because I have seen so many zombie movies that I just don’t see anything particularly new in it.



You also wrote novellas. What themes do they deal with? Do they hold the same humorous content? 

As I mentioned above, my short stories were very serious and very literary—with the exception of one about man who, failure in life, became a failure as a zombie as well. Most of them centred on chance encounters between strangers, in which one or both learned hard truths about themselves. Most of live in our comfort zones, surrounded by family and friends who don’t encourage or enable self examination. Sometimes it takes a stranger to open our eyes.

Is Nairobi, the city you're living in, an influence?

It has taken me a while to start writing anything set in Kenya, as I like to take the time to get used to a place and understand it better before I start to write about it. I’ve written one short story based around Nairobi (http://www.telegraph.co.uk/culture/hay-festival/9535885/Hay-Festival-Nairobi-A-story-by-Michael-Logan.html), and there is a scene in the Apocalypse Cow follow-up that’s set in the city. I also have plans for further work set here, so it is a growing influence.